Mardi 22 mai 2007 à 22:17

Il y a cette rue sombre dans laquelle coule un rayon de lumière. Je pose le pied sur le pavé tacheté, faisant fuir quelques ombres fugaces. La brise molle s'appuie à mon cou et se loge dans mes bras. Le silence tombe, alors que les ailes des anges se ferment. Le temps neige en flocons transparents contre ma peau diaphane. Mon iris irradie une étrange lueur, et l'attente se conforte au coin des volets fermés. Il n'y a plus de bruit, la vie s'est tue. Un furtif mouvement, à l'interstice des grillages. L'œil aux aguets, on tente de percer l'obscurité partielle, derrière les fenêtres endormies, on s'écorche l'oreille contre ce vide auditif. Les âmes s'évadent, un peu trop légères, le long des troncs Les feuilles tremblent, dans un dernier frisson. Mon cœur bat, contre cette poitrine lourde. Le rêve s'endort, entre les lèvres entrouvertes. Les secrets sont tus, mais les âmes sont à nu. Voyez les angélus qui penchent leurs doux visages sur vos yeux fermés. Un parfum d'infini sombre dans l'oubli. La lumière se retire doucement. Les Messagers s'en vont, laissant une plume tiède au creux du poing. Le cœur sort de sa torpeur. Il ne reste que cette chaleur et cette odeur. Un mystère insoluble.

 

Et la nuit est tombée.

Mardi 8 mai 2007 à 23:22



Une goutte de pluie, sur le bout de l'archet. Voilà qu'il tangue, d'avant en arrière, perdant l'équilibre. Barriolages en sol et ré. Arpèges emmêlés sur accord brisé de la. Et bascule en mi. Me voilà perchée en quelque hauteur perdue, et je m'avance, enhardie par la force d'une harmonique. La corde s'incline et vibre, sous la volonté artistique. Et si nous allions un peu plus loin ? Voilà que les aigus se laissent dompter, pour un frêle  instant. Les mots s'envolent en farandoles colorées mais inutiles. Chacun se tait et ferme les yeux, doucement. On hoche la tête, en un accord tacite et, bercé par la puissance des doubles cordes, s'enfonce dans la volupté d'une éphémère seconde. Et puis on reprend conscience, presque révolté, réveillé par une bravade sur sol, fier espagnol. Partons donc à l'assaut du chevalet, quitte à y laisser quelques morceaux de soi. On se fige, un instant, la pointe en l'air, dans un silence presque insolent. Les souffles se coupent, et on ne bouge plus. Tous se taisent et observent les crins ivoire qui retrouvent l'argent de la corde. La rencontre se fait, finalement. Caprice en fa Majeur. Et que je vous lance des piquées, à travers l'air chargé d'attente. Un claquement, comme une robe qu'on rabat avec empressement, dans un flamenco endiablé. Les talons qui martèlent le parquet, marquent le temps, et s'enfuient à travers la piste marquée de brun. Attrapez donc cette gamme avalée par la vitesse et n'oubliez pas de vous rasseoir, alors que le vibrato se fera plus large, sur les triolet de noires. Et la musique se fera langoureuse. Lentement, vous sentirez ce roulis perpétuel de la passion s'enrouler autour de vos chevilles et de vos poignets, remontant vers vos coeurs tremblants. N'ayez pas peur d'étouffer, alors que les notes se feront triomphantes, et que le ton sera élevé. Respirez simplement au rythme des syncopes et des appogiatures. Et alors que les quatres dernières vibrations se seront éteintes, alors vous vous rappellerez cette salle confinées, cet espace restreint, ces sièges de velours, au pourpre sali. Je n'attends rien de vous, non. J'espère simplement, d'un archet encore tremblant, vous avoir fait revivre la sensation de cet amour passionnel, au goût charnel. J'espère.



<< Page précédente | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | Page suivante >>

Créer un podcast