Lundi 10 septembre 2007 à 10:16

Introduction.

Il s'agit d'un rêve, à vrai dire mes amis. Ce n'est que l'illusion illusoire d'un monde sans vertu qui nous entoure de ses bras tentaculaires. Et pourtant, il y a ces jours où l'on pourrait croire à l'avènement d'une seconde meilleure. C'est un sourire, au coin de mes lèvres retroussées, qui se dessine, comme pour saluer l'espièglerie de l'heure.


Développement.

Un plan en trois parties, m'aviez-vous dit. Le conformisme me dérange, alors que je m'y applique. C'est chose étrange que le comportement humain, saviez-vous ? C'est une sorte de conception en opposition à chaque instant. Antithèse et bon vouloir. Les questions n'attendent pas de réponse, et cette copie restera désespérément vide. Qu'attendre de plus, lorsque la consigne s'inscrit de lettres invisibles ? Non sens, presque anglo-saxon. C'est une erreur, ou presque. Mais les carreaux ne demandent pas l'encre, alors nous ne grognerons pas devant le gouffre insensé de nos pensées détraquées. C'est amusant, au final.


Conclusion.

Il n'y en a pas. Que dire à propos de ces quelques mots sans valeur, qui se disputent le début du paragraphe ? Les lignes s'entrecroisent, comme des vies inachevées, et c'est peut-être cela qui est le plus drôle. C'est une coïncidence calculée, comme lorsque les mains se touchent, avant le premier baiser. Il me semble que les idées s'arrêtent là, pour ne pas plus s'emmêler.


Post It.

Soyons franc. Nos pas ne font que se chasser, et ce n'est pas bien drôle. Il y a encore des choses à écrire, en fait, mais nous nous contenterons d'un post-scriptum non noté. Nul bénéfice, puisque le rouge ne rayera que par habitude, sans s'arrêter sur le sens délivré. C'est drôle, mes enfants. Drôle et frais. Il n'y a peut-être que les images qui pourraient vous représenter ce qui me vient à l'esprit. Alors à vous d'imaginer.



A revoir, encore et encore. Et à relire, très certainement.


Vendredi 7 septembre 2007 à 21:39

C'est dans mon verre que je me bois.

Il y a comme un parfum Apollinaire dans l'air. Une ritournelle qui ne s'arrête que pour observer les passants éberlués. Assis à une table, mon poète maudit ressasse ses idées noires, en sombrant dans l'anonymat des pauvres. Il sirote son ambre, sans conviction, la jambe au fût, le bras au tronc. C'est un être étrange que mon ami joli qui se croit maître du monde, de son verre ébréché, de son air éméché. La flammèche se tord et se cambre, alors qu'il la suit, hagard, s'enfuir dans une brume éthérée. Ô oui, il est beau mon compagnon éploré, sur sa table grasse affalé, regardant passer les demoiselles effarées et les damoiseaux égarés. C'est une danse, oui. Une sorte de polka où les pieds fous se renversent, emmenant avec eux les têtes fragiles des cous brisés.

C'est dans mon verre que je me vois.

Apollinaire s'est couché, Zola s'est relevé. Une tombe ouverte sur un monde à découvrir, peut-être. La mort n'est qu'une étape, qu'un passage obligatoire dans une vie trop courte. Ou trop longue. Sartre me glisse quelques mots, au passage. Comme quoi l'Enfer, c'est les Autres. Ah, copain de route de ton livre effeuillé que la sagesse folle accompagnait dans ses errances nocturnes. C'est un sourire que tu m'offres, comme une escapade volée. Je marche dans tes pas, tentant de retrouver tes paroles envolées. Papier engorgé, plume débordée, tes mots tanguent et s'enchevêtrent sans se rejoindre. Quelle parade insolite, me diras-tu. Je ne t'ai pas terminé. Tu n'es qu'une ébauche, tout comme mon écrivain damné d'un paragraphe inachevé, qui se mirait dans les yeux des filles entichées. Un jour, peut-être, un point final au bout d'une sinueuse ligne. Mais ce soir, complice abandonné, je te laisse à ton triste sort, celui de te faire décortiquer, encore et encore, par ces écervelés.

Et c'est dans mon verre que je me noie.

Ah, je l'avais oublié, de ce fait, mon monsieur Z. Celui qui zèbre, oui, entre l'absinthe et la prune. Un fond troublé qui se fond au palet. Redondance. L'eau est d'or, et c'est une rarissime denrée qui te fait délirer. Délier. Je ne sais. Ta main est tombée du bois crasseux, et tes doigts tracent des cercles circonflexes avec les charbons complexes d'un feu éteint. Celui de ton cœur lassé, peut-être, qui sait ? Peut-être un contemporain te rejoindra-t-il, dans la cour des miracles, sans t'offrir cette liqueur salvatrice. Tout n'est que mélange, car tes pensées se tournent vers  un tout autre. Non, je ne te parle pas de celui-là, mais très certainement d'un autre. Un escalier tortueux, dans une montée démoniaque vers la déchéance abîme. Chemin entrecroisé de routes écartées, dans un dédale sans raison. Je vous l'accorde, c'est sans issue. Mais peut-être est-ce ainsi, au fond de ce verre sale, emplit de feu sans ardeur. Une sorte d'illusion. Celle de votre vie, mes amis, dans le reflet tremblotant de cette vérité amoindrie. Un Mentir-Vrai, peut-être, pour ne plus citer. A. A. B. H. S. Z. Ce ne sont que des lettres, celles que l'on vous attribue. Attribut. Tel celui du sujet, assurément. Ne m'en voulez donc pas. Je m'en reviens à vous, docile. Mais vous êtes à ma merci, entre les larmes noires des écrits vandalisés.

Et rire, jusqu'à plus soif. Plus faim. Plus envie. Au clair de lune, les auteurs me font révérence et les poètes maudits m'enveloppent de leur cape sombre. Je suis d'eux, sans jamais les frôler. Exaspération.




Post scriptum :

Garcin

« Le bronze… (Il le caresse.) Eh bien, voici le moment. Le bronze est là, je le contemple et je comprends que je suis en enfer. Je vous dis que tout était prévu. Ils avaient prévu que je me tiendrais devant cette cheminée, pressant ma main sur ce bronze, avec tous ces regards sur moi. Tous ces regards qui me mangent… (Il se retourne brusquement.) Ha ! vous n'êtes que deux ? Je vous croyais beaucoup plus nombreuses. (Il rit.) Alors, c'est ça l'enfer. Je n'aurais jamais cru… Vous vous rappelez : le soufre, le bûcher, le gril… Ah ! quelle plaisanterie. Pas besoin de gril : l'enfer, c'est les Autres. »

Jean-Paul Sartre, Huit clos.


Même si nous n'en avons peut-être pas le droit, ou l'autorisation.
(Notions à étudier.)


Jeudi 30 août 2007 à 14:15

 Voilà la Reine. Elle se tient droite, sur son trône de marbre, tenant en sa main un sceptre d'or. Elle rayonne de mille feux, le regard tourné vers l'avenir. Majestueuse statue, elle s'offre aux regards curieux. Le vent se lève, caressant ses cheveux de bronze dans une énième étreinte. Mais elle est bien seule. Ses mains d'airain n'enserrent plus d'amants, ses lèvres de métal n'embrassent plus les cœurs. Elle est là, assise sur un trône de solitude, alors que les passants s'en vont, au cours du temps qui s'enfuit.

 Et je m'approche de toi, reine déchue. Je pose mes yeux avides sur ta carcasse décharnée, en réalisant le subterfuge. Tu n'es qu'une ombre pourrissante, dans un coin oublié. Ta peau tombe en lambeaux, feuille d'or déchirée. Tes yeux de rubis t'ont été volés par des brigands peu scrupuleux. Tes doigts fins se teintent de rouille, et ta toge est tachée. Que reste-t-il de la beauté illusion que tu nous accordais, de tes hauteurs sacrées ? Rien. Il ne reste rien. Ton cœur ne sonne plus l'amour, et ton corps ne respire plus la gloire. Tu n'es plus que les restes fumants d'une gloire fanée. Il ne reste de tes os que la poussière grisâtre du passé. Je pose ma main sur ton genou décrépi, et voilà qu'en tombent les vestiges des souvenirs grisants. Non, tu n'es plus rien, ma dame. Tu te décomposes lentement, alors que la boue laisse des traces noirâtres sur ton visage triste, larmes de souffrance d'une géante mise à bas. Ta puissance s'efface, et tes exploits se perdent. Ta couronne tombe, et ton héritier est mort. Ce matin, je vois ton vrai visage, femme corrompue. Je vois tes traits affaissés, et tes désirs fracassés. Je vois les traces du temps sur ta peau ridée, et les marques des hommes, cupides et veules, contre tes lèvres desséchées. Ils t'ont trompée, blessée et oubliée. Tu n'es qu'un lointain souvenir, beauté abandonnée, dans leur cœur décharné. Pleure, ma Reine, pleure sur ton sort. Laisse l'eau inondé cette sécheresse et nourrir ta peine. Emporte au loin les déchets qui se décomposent à tes pieds. Pleure, jusqu'aux âmes impies de ces êtres impitoyables. Le fleuve noie peut-être les regrets, jusqu'à la Dame de pierre, celle qui s'ouvre en dernier refuge, lorsque les esprits sont perdus. Cours jusqu'à elle, et jette-toi dans ses bras. Accepte son baiser de rédemption, et accorde ton pardon. Ils n'étaient pas prêts à te comprendre. Ils n'étaient pas prêts à te voir. Ils t'ont oubliée, dans l'espoir d'un avenir différent. Ils ont laissé les cendres et les carcasses te recouvrir, t'asphyxiant peu à peu. Balafrant ta peau, trompant ton âme, trouant tes rêves, ils ne t'ont laissé qu'un soupir frissonnant, une mince parcelle de conscience. Tu gis, à terre, démunie et dénudée, bleuie de coups et de trahison. Tu n'es plus qu'un cadavre vieillissant, une relique pourrissante. Avoue ma Reine, que tu as honte. Avilie, anéantie, tu te couvres le visage de tes mains raidies. Ha, ma Reine, je t'offre mon regard aiguisé, pour que tu y découvres la vérité blessée. Je ne suis qu'un médiocre serviteur de ta force passée, et je ne peux te rendre ton siège doré. Je ne peux que t'observer et noter ta décadence certaine. Tu n'es plus qu'une ombre, au détour des ruelles, face aux beautés naissantes.

 Et pourtant, ma Reine, je t'admire. Dans tes suffocations difficiles, je t'accompagne. Ta main gantée me tourne la tête, quand j'y sens les odeurs de pluie et de terre mouillée. Tes yeux arrachés, vides sanglants, sont aussi les tréfonds de ta délicieuse âme, ô combien tourmentée, mais à quel point admirée. Tes lèvres de vert se teinte d'une douce lumière, au levé du soleil, alors que tes tortionnaires dorment encore. Ton front, ceint de honte et de misère, relève encore de la fierté d'autrefois et les rides profondes de ton visage fiévreux me rappellent tes longues veilles paisibles. Mes yeux se posent sur ta robe grise, et se remémorent la fraîcheur de la soie blanche et l'éclat des pierreries. Tu étais grande, ma Reine, et chacun devrait s'en souvenir. Les vaisseaux de ton cœur s'effritent, mais le souvenir est gravé dans la tombe. Tu étais grande. Peut-être la plus grande. Et il ne faudrait qu'un souffle pour que tu le sois à nouveau. Mais déjà le jour se lève, et ils approchent. Je m'éloigne de ton corps fragmenté, doucement, sans un bruit, la tête baissée. J'entends un râle, dans la brume latente de la froide matinée. Je m'éloigne, et j'attendrai la nuit, douce femme éplorée, pour te présenter à nouveau mes hommages. Il est trop tôt. Il est trop tard. Simplement trop.


Ma Reine, tu n'es plus. Mais ma Reine, je te salue.


Un souvenir grisant d'une grise matinée. Le sentiment de tenir le fil.
Paris, tu étais bien laide et bien misérable, en ces froides lueurs du jour qui naît.

Lundi 27 août 2007 à 0:36

Etre un bout de bois, à la dérive sur un océan déridé. Oublier sa propre existence pour mieux ressentir le néant. L'absence devient essence, et chaque particule d'un corps à l'abandon s'offre à la caresse de l'anonymat. Il n'y a plus de nom, plus de raison, juste ce sentiment envahissant de désinvolte disparition. On ne se bat pas pour rester, non, on combat pour s'en aller. Fuite vers l'inconnu, toute bride abattue. Un lointain appel auquel on ne répond que par une longue complainte hurlante. Comme le monde est étrange, lorsque les coeurs s'emballent et les âmes s'envolent.

Les embruns m'enserrent, dans une étreinte à couper le souffle. Quelques mèches volent devant mes yeux aveuglés, dans une farandole sans ordre ni rythme. Je suis emmenée malgré moi dans cette danse frénétique, dramatique, diabolique. Une odeur saline, câline, sur une peau praline. Un son égrainé au creux des vagues, audacieux, doucereux, fallacieux. Et des mains qui courent sur mon corps, relevant les courbes, cassant les pointes. Je suis brisée, dans les bras de se monstre aux yeux d'azur. Je m'écroule, dans ses humides torpeurs. Et mes pensées sont absorbées, malheureuses victimes d'un massacre grammatical, entre les rochers saillants. Je suis à la merci d'un homme fort, d'un appétit insatiable, d'un coeur sans fond. Prise au piège dans les mailles glissantes d'un filet infini, je suis écrasée sous le poids du réalisme. Accepter de n'être, finalement, qu'une épave dans une mer inexplorée, sans boussole ni compas. Offrir son âme à la première aide venue, impromptue, sans savoir si elle vous mènera au port ou au grand large. N'être plus fait que d'insouciance et d'imprévu, sans la moindre vertu. Il est trop tard, le navire s'en va, derrière les ondées. Je monte, à grand pas, sur le pont de bois gravé. L'eau s'infiltre au cœur du monstre, me mordant la chausse. Je glisse, alors que la quille balance. En dehors, les maux de travers tanguent sous le mat. Allons moussaillon, contre vents et marées, à la découverte d'un monde sans nom. Une corne de brume, et la sirène plonge jusque dans les entrailles de cette mer désordonnée, jetant ses cheveux d'algues entre les rochers verdâtres. Je ne suis qu'ombre sombre, qu'on ne dénombre, entre les bras tentaculaires d'un corps démembré. Je m'effrite, illicite, dans un verre glacé. Et je ris. Je ris, sans fin, sans destin, d'une bouche édentée et tordue, sous la voûte tendue du ciel zébré. Je ne suis rien. Pour tout vous dire, cela me rassure, de n'être qu'une poussière obscure d'un jeu de fakir. Je m'y détends, m'y étends, m'y méprends. Et les vagues sauvages me happent, lorsque je m'enfuie en hâte.

Marée montante, mes amis. Il n'y ni haut, ni bas. Juste le silence brisé d'un océan capricieux. L'eau se mêle à la vie, et la vie s'emmêle à l'eau. Chacun se perd pour mieux se retrouver. Et c'est alors que s'envolent les dernières mouettes, vieilles gardiennes de ces secrets perdus, au creux d'une crique encastrée. Le mortel voit apparaître sa nature, et dans un cri de frayeur, tombe à la renverse. Peut-être trouvera-t-il la corde qui l'amènera au bastingage. Peut-être pas. Mais la corne de brume continue d'hurler, alors que les sirènes tordent leurs cheveux tressés. Passe, voyageur abusé, poète oppressé, âme tourmentée. Passe, mais n'oublie pas de goûter à la douceur d'un instant inexploré.


Oh, non, ce n'est pas un retour fracassant.
Ainsi soit-il. Nous verrons bien plus tard.

Lundi 27 août 2007 à 0:35

Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un retour fracassant, mais il s'agit néanmoins d'un retour. Du moins, je le pense. Après tout, seuls les plus sages font l'erreur d'être sûr. 
Et j'en ai assez de ces articles idiots à deux lignes. Mince !

A tout de suite.
Apfel.

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