Jeudi 24 avril 2008 à 1:03

Amour-passion; mort-érosion. C'est un jeu morbide mais excitant qui nous tient en haleine. Celui du tour de passe-passe entre désir et néant.


Boris, ton corps contre le mien. Je sens le souffle chaud de ton existence contre mon cœur meurtri. Je chavire d'amour. Tes mains ont dénoué lentement les nœuds de mon appréhension, alors que la nuit fuyait à l'aube blafarde. Boris, ton parfum prédateur sur ma peau oubliée, qui me rappelle doucement que oui, je suis. Mais Boris, déjà tu m'échappes, criblé de balles ennemies, alors que ton dernier baiser résonne encore contre ma joue. Tu as cessé d'être, sur le champ de bataille, embourbé dans cette gadoue minée, sans me laisser le moindre espoir de survie.
Et pourtant.

Gregor, ton charme naissant dans mon regard velours. Je te souris, un peu amère, mais tu sais bien, pour Boris, et tu m'offres ta patience. Gregor, tes bras, ton regard, tes mots. Je ne suis plus sensuelle, habituelle, simplement ravagée de chagrin. Tes silences sont exutoire et ta présence espoir. Je n'ai pas encore succombé, il reste une lueur, au loin. Gregor, dans ton bonheur silencieux, ma renaissance. Mais Gregor, déjà tu halètes, dans ce lit noir. Tu souffles, tu gémis, tu cris. Puis tu te tais. La sueur recouvre ton front, ainsi que les noirs bubons. Dans la souffrance sordide de la maladie, tu me quittes. Noirs horizons.
Et pourtant.

Piotr, tes yeux de braises, ton cœur de cendres. Tout contre ton âme, j'ai trouvé le repos. Mots de velours, ponctuation de satin, chaque instant est alexandrin, sonnet. Nous sommes heureux, Piotr, ma main dans la tienne. Il ne nous reste guère qu'une commune douleur, mais elle s'atténue dans nos complicités implicites. Piotr, amant de secrets, comme si rien ne devait jamais finir. Mais Piotr, mon souffle est court, mes mains tremblent. La ride court de mon front à mon frêle sourire. Me voilà qui m'enfonce peu à peu dans le bienfait d'un sommeil sans lendemain.
Et pourtant.


Boris, Gregor, Piotr. Amours perdus. La mort vous guettent, amants furtifs, comme elle a brisé mes pas. L'Eternité est un mensonge glacé, mais peut-être faut-il simplement apprendre à La déjouer ?
Piotr, et pourtant. Mais qui nous en dira la fin, à présent ?


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Mon plus bel amant, sûrement en Boris et son enchantement néologique. Boris, vous savez, avec un V...

Mardi 15 avril 2008 à 22:40

Voici les dernières trompettes, celles qui annoncent ma fin. Je m'avance, dans le silence pesant d'un dernier souffle. C'est le loup de ma propre vie qui me poursuit, me harponne, me dénonce. Le temps coule à flots entre mes yeux abusés, et Chronos me montre du doigt, furieux. Il ne reste rien.

Voici ma mort. Je n'existe plus. Je ne suis qu'une âme, et encore. Je flotte, dérive effrayante, dans un gouffre sans fond, sans histoire. Je suis à bout de souffle, noyée dans l'expérience du néant, hurlant silencieusement dans mon refus de disparaitre. L'océan de désespoir me happe et m'emporte, alors que tout espoir onirique d'un possible échappatoire s'efface. Je ne suis plus. Et tandis que tous mes sens m'abandonnent, quelques cerisiers fleuris d'un Japon dégringolant m'accompagnent encore dans cette chute infinie.

Ouverture en mi mineur, trombone, cor et tuba. Ma vie m'apparait comme un opéra, derrière masques et costumes, sur fond d'indifférence et d'absence. Il n'y a pas de décor, non. Il n'y a que la certitude frissonnante d'un manque, d'un vide qui vous consume dans l'absurdité de toute une existence. Les masques tomberont peut-être au troisième acte, alors que les chanteurs salueront le public endormi, mais il sera trop tard. Le couperet sera tombé sur les cous trop fragiles d'un questionnement sans fin, d'une incertitude nauséeuse.

Je suis seule face à ma propre finitude. Il n'y a plus cette masse doux-aigre qui m'entoure, me rassurant sur la pertinence de ma propre existence, non. Il n'y a plus ces corps qui se frottent contre moi, me faisant croire qu'il est possible de vivre. Il n'y a plus de tu répondant à ce je, d'intersubjectivité existentielle, essentielle. Je suis seule face à moi-même, face à cette carcasse vide de sens. Et voilà que tous mes espoirs viennent se briser sur une certitude aiguisée: il n'y a ni tu, ni vous, ni je. Il n'y a que la présence insolente du temps qui passe, sous le regard condescendant de divinités fatiguées, et ma simple insignifiance.


Tout s'est écroulé. Mon hypothétique vie n'était peut-être qu'un songe à peine consommé.
Mais trop tard.
Adieu.

Samedi 12 avril 2008 à 15:16

Je suis reine de froideur, enterrée vivante sous mon dédain. Je suis corps abandonné qui te méprise de sa hauteur solitaire. Je me tapis dans la soie et l'or, luxure langoureuse, t'observant de mon cocon d'indifférence.


Tu aimes l'amende douce et rassurante de mon œil, le cercle parfait et aguichant de ma lèvre, la ligne floue et intrigante de mon visage. Je suis ton mystère parfumé, enveloppé de secrets effrayants.
Tu aimes la courbe imperceptible du satin sur ma jambe immobile, le pli presque invisible des fleurs de lys dans mes cheveux de jais, le mouvement silencieux du vent contre ma silhouette fragile. Je suis ton souvenir le plus effacé, ton amour le plus oublié.


Je suis reine de froideur, sur mon trône de mépris. Tu aimes de moi ces choses-là que tu penses voir. Qui te soufflent des rêves fous, alors même que ma bouche n'a délivré mot. Tu aimes le fantôme de tes fantasmes, flasque d'espoir. Mais je ne suis pas. Je ne suis plus.

Qu'un  songe impossible, au parfum inodore de lotus.


Samedi 12 avril 2008 à 15:02

Je m'excuse pour mon absence prolongée. J'ai déménagé, et j'ai mis un certain temps à retrouver internet.

Mardi 18 mars 2008 à 15:53

L'odeur de mon amant coule sur mon corps endormi. Je suis allongée, muette, respirant les derniers volutes de cette volupté interdite. C'est elle qui vous assaille et vous ligote, au coin d'une rue, au détour d'un regard. L'essence vous enrobe, vous caresse, puis vous emprisonne. Fin. Ou presque.

C'est le parfum des hommes de pouvoir qui vous aiment à vous briser, puis qui vous oublient. Celui des mâles forts, qui dominent et jettent. Il vous rassure, de son raffinement brutal, âcre, épicé, jusqu'à vous en donner nausées. Ô, alors que ses doigts longs et gantés se referment sur vous, vous gémissez du plaisir douloureux de l'étreinte violente, cajolées, asphyxiées. Ils vous aiment, ces hommes grands et puissants, jusqu'à vous détruire. Et dans leur indifférence affective, ils vous écrasent de sentiments, toujours dans cette doucereuse atmosphère olfactive. Ils vous attirent, vous terrorisent. C'est la seconde folle d'un impossible avenir, lorsqu'au col de leur chemise vous récoltez le précieux encens.

Allez donc, femmes fragiles, au bras de ces ombres parfumées, de vos ébats vous entêter. Jusqu'à ce que.

L'amour existe peut-être.
Peut-être même chez ces hommes-là.
Là-bas, quand le rideau tombe.
Tombe et amour.

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