Samedi 15 septembre 2007 à 21:33
C'est un amour fictif, une rencontre furtive. Ce n'est que l'illusion fallacieuse d'un sentiment partiellement faux. Ah, c'est drôle. Je m'enfonce les ongles dans la paume de la main pour me convaincre de cette nouvelle condition. Je m'y efforce, tout du moins. Frustration, dans cet éclair grisé. Une vitre teintée et des rires qui fusent. Mon cœur s'est retourné, dans un soubresaut fatal. Tu étais assis, nonchalant, sur cette chaise tressée. La fumée t'offrait ses bras protecteurs, alors que ta tête penchait dangereusement sur ce sourire effacé. Tes yeux de mer m'encerclent et me noient. C'est doux, c'est fou. Ce n'est qu'une illusion, mais elle me parait éternelle, tout comme cette existence – si je puis dire – qui s'éternise sans raison. Tes cheveux de blé s'épandent sur tes épaules dorées, alors même qu'une lueur éclaire ton regard. Je ne suis plus. Je me fonds dans cette tendresse inconnue. La tendresse de l'infini, en quelque sorte. L'infini de l'amour qu'on ne connaîtra jamais. J'aime à te croire mien, cher innommé. A imaginer tes mains fines et nerveuses sur ma peau fébrile. A penser tes lèvres douces sur ma nuque frissonnante. Tu es le rêve implicite de ma vie, celui qui m'aurait peut-être éclairée. Mais cette seconde est écoulée. Elle n'est plus. Ton sourire s'est effacé dans le rétroviseur de ma destinée, tu n'es plus qu'un songe décomposé. Une image sans forme, une odeur sans parfum, un son sans prononciation. Tu ne portes ni nom, ni âge, ni entourage. Tu es le prophète des non-dits, certainement. Le roi des insinués.
Je ris. Je jette mes cheveux au vent, ceux qui ne sont qu'ébène et qui manquent de la lestée de ta blonde chevelure. Il y a un vide, désormais, comme un regret qu'on ne comprend pas. Tu n'as été qu'un instant anonyme dans ces heures d'égocentrisme, et cela me trouble. Ombre dans une rêverie trop sombre, je ne vois que tes traits qui se dissipent. Ô rage, ô désespoir, comme disent les dramaturges. Tu es le protagoniste qui meurt dans son sang, à la fin de la tragédie, en professant ces paroles tristes et angoissantes d'un amour sans lendemain. Oui. Tu es mon prince maudit qui se terre dans ses regrets cendrés. Ah, prend moi donc dans tes bras, cœur exsangue, pour me montrer la profondeur de tes sentiments. Je ne suis pas reine, mais je t'offre l'espérance de ce moment éphémère. Oui. Je te l'offre. Avec ce que tu voudras prendre de moi, encore. Je suis comme cette rose pâle d'un matin blafard, avec ses pétales qui s'effeuillent, entre blanc, rose et jaune. C'est une jupe froissée, une farandole brisée. Quelques couleurs qui s'entremêlent et se dévisagent. Chaque parcelle se détache et se fane dans un voluptueux soupir d'extase. Cette rose passe, comme mon corps qui se dégrade. Mais il y a ce cœur perlé qui se meurt de n'atteindre l'air. Cet air que tu avais insufflé en mes pensées. Chevalier, je me meurs. Dans cette attente latente, je disparais. J'emporte avec moi ce souvenir controversé. Je suis coupable. Coupable d'avoir été, durant cette seconde d'inattention.
« Je pense, donc je suis. » R. Descartes.
C'est étrange, je ne sais pas s'il faut y croire.